La digitalisation de la Fashion Week

Crédit photo : https://blog.mbadmb.com/fashion-week-linfluence-des-reseaux-sociaux/

La Fashion Week, aussi appelée semaine de la mode, est le grand rendez-vous de l’hiver où des marques à la renommée mondiale présentent leurs nouvelles collections. Du prêt-à-porter à la haute couture, il y en a pour tous les goûts ! Vos stars et vos influenceur·euses préféré·es répondent bien souvent présent·es et incarnent une vraie stratégie de marketing digital, visant à attirer un public plus jeune. Petit tour d’horizon sur ce qu’est la Fashion Week vue sous l’angle de la communication !

La Fashion Week, c’est quoi ?

Lorsque l’on dit “Fashion Week” on pense instinctivement défilés, maisons de couture, paillettes, stylistes, talons vertigineux, affluence devant les catwalks. En réalité, plus que des défilés de mode, ce sont des spectacles à part entière, attendus avec la plus grande impatience pendant plusieurs mois par les passionné·es de mode. 

Initialement, cet événement permettait avant toute chose aux marques et créateurs de présenter leur prochaine collection au cours d’une représentation (qui a généralement lieu en petit comité, sans prétention aucune) ou d’un défilé. Si ce dernier est privilégié par une grande majorité des marques, c’est bien parce qu’il matérialise l’occasion de répondre à un objectif stratégique : dévoiler et faire parler de leur collection. Les plus grandes maisons, comme Balmain, Vuitton ou Dior, y présentent le fruit de leur dur labeur. 

La célèbre “semaine (week) de la mode (fashion)” est en fait une suite de défilés centrés sur la mode organisée en deux temps forts à l’année ; les défilés Haute Couture, et les défilés de prêt-à-porter. Le rendez-vous a lieu dans 4 villes phares : New York pour la première saison, suivie de Londres, Milan, puis bouclé par la célèbre Ville Lumière, Paris. Par conséquent, l’évènement s’inscrit véritablement dans une portée internationale. 

Outre la mode en elle-même, la tendance de ces dernières années est à la digitalisation, caractérisée via la diversification des audiences par les marques ainsi que la recherche d’originalité et d’innovation dans les formats de communication proposés. L’objectif premier de cette initiative est d’élargir leur champ d’action. 

La fashion week 2.0

Alors que les Fashions Weeks s’enchaînent, les marques sont de plus en plus investies dans le digital. Toujours attentives à maintenir leur caractère inaccessible et mystérieux, seule une sélection d’invité·es trié·es sur le volet ont pu accéder aux défilés de la Fashion Week pendant de nombreuses années. 

Aujourd’hui, une nouvelle figure très populaire auprès des marques de luxe sont les influenceur·euses. Les griffes dénichent elles-mêmes ces nouveaux visages en espérant attirer une nouvelle cible, plus jeune. Iels sont traité·es comme toutes les célébrités. Placé·es aux premiers rangs, iels participent à la démocratisation et la démystification de ces évènements de la mode.  

Leur image et leur visibilité mettent en lumière ces semaines mondialement attendues sous un angle inédit. On pense à l’influenceuse et tiktokeuse Charlie D’Amélio, présente au premier rang lors du défilé Prada automne-hiver 2022-2023 à Milan. Cette adolescente de 15 ans, très populaire auprès d’un jeune public, a également posté plusieurs vidéos sur ses réseaux où elle porte des tenues de la maison. Ces contenus de sa propre production, au-delà de la mettre en scène, expose les créations Prada, qui met son image entre les mains de l’adolescente. 

Par ailleurs, les marques elles-mêmes investissent les réseaux sociaux. Prenons l’exemple du créateur Jacquemus qui a fait la promo d’un événement sur son compte Instagram avec un post décalé qui a fait réagir la toile. Il dévoilait la vidéo d’un distributeur automatique de sac à main de la maison de haute couture. 

On peut affirmer que les réseaux sociaux s’emparent de la Fashion Week et la plateforme tiktok ne s’arrête pas là. En effet, elle propose aux maisons de haute couture de diffuser leurs défilés et les coulisses en direct. La version chinoise de l’application (Douyin) a mis en place un système en collaboration avec la Fédération de la haute couture et de la mode qui permet de diffuser les shows à ceux qui n’ont pas pu se déplacer.  

La stratégie d’influence se révèle un atout important pour les marques à l’heure où les réseaux sociaux sont rois. Un hashtag efficace peut faire toute la différence lors d’un défilé et décupler la popularité d’une marque. 

Les réseaux sociaux, un accélérateur de performance

La prise de conscience des enjeux environnementaux et d’inclusion devient de plus en plus importante autour de différents publics. La plupart des marques doivent adapter leur stratégie et leur discours pour répondre aux nouvelles demandes des cibles. De ce fait, pour la saison d’automne 2022, les maisons de luxe se sont engagées à communiquer à travers les réseaux sociaux leur engagement pour la transition énergétique et son implication pour le luxe durable comme pour la mode inclusive.  

Ainsi, Gabriela Hearst a décidé d’aménager la salle du défilé avec des arcs qui représentent l’énergie de fusion. Un choix qui a créé du buzz sur les réseaux sociaux en donnant à la marque plus de visibilité autour du public.  

En rapport au sujet de l’inclusion, Etam a choisi pour la première fois une femme enceinte pour son défilé lingerie. Constance Jablonski était enceinte de huit mois lors de sa participation sur le podium.  

L’Oréal a aussi été au cœur du même sujet avec son thème “Walk for your worth”. Son objectif étant d’encourager la beauté inclusive et décomplexée. Les défilés des deux marques ont eu un succès supplémentaire grâce à la médiatisation des shows sur différentes pages web et sur les réseaux sociaux, en particulier sur TikTok.  

Enfin, pour ce qui concerne la Fashion Week de Paris 2022, l’image qui reste la plus présente est celle du défilé Coperni au Musée des Arts et Métiers de Paris. Le show étant diffusé en direct sur diverses plateformes a propulsé la popularité de la marque en assurant le plus grand buzz médiatique de la semaine. Vers la fin du défilé, la maison a décidé de créer en direct sur scène une robe “innovante”. Pendant 10 minutes plusieurs personnes ont vaporisé, sur la top model Bella Hadid, une peinture spéciale qu’une fois sèche, a pu être moulée en une robe. 

Le revers de la médaille

Malgré son indéniable succès d’années en années, le défilé de la Fashion Week n’en est pas moins victime de sa notoriété digitale. En effet, il a fait l’objet de nombreux bad buzzs dans les médias sociaux. De multiples critiques, polémiques et indignations sont régulièrement soulevées sur le net par les internautes. Entre poids des mannequins, appropriation culturelle trop souvent jugées inadéquates, accusations de racisme ou encore promotion de la surconsommation : on ne compte plus les sujets d’indignation face à cet événement grandiose.  

Quelques exemples marquants nous viennent d’ores et déjà à l’esprit en matière de bad buzz sur les réseaux sociaux concernant ces grands défilés de mode haute couture.  

Tout le monde a encore en tête le fameux “collier suicide” de Givenchy : cet accessoire avait fait parler de lui de par son caractère très suggestif. En effet, ce dernier, en forme de nœud coulant, avait été très fortement critiqué et avait énormément choqué le public. La question très souvent soulevée par ce bad buzz concerne la frontière entre la censure dans la mode et la détresse de la population. En effet, de nombreuses personnes, et plus particulièrement les jeunes, se sentent en détresse et le symbole mis en exergue par le collier ne passe pas. Les réseaux sociaux ont d’ailleurs été le moyen de communication de prédilection pour relayer ce bad buzz. 

Cependant, certain·es misent sur la liberté de la créativité et ne cautionnent pas ces phénomènes sociétaux obligeant les marques à faire attention au moindre détail de leurs pièces ou bien de leurs campagnes de communication. A l’ère des réseaux sociaux et de la diffusion massive et rapide de l’information, quelle qu’elle soit, les sujets ont plus que jamais tendance à fédérer un nombre considérable d’internautes révoltés par un sujet.  

La marque de haute couture Louis Vuitton avait également été victime de ce phénomène puisqu’un manifestant arborant une pancarte critiquant la surconsommation (“extinction – rébellion”) s’était glissé dans le défilé. Cette action avait évidemment provoqué par la suite une vague de revendications et de critiques directement adressées à la marque en elle-même très relayées par les médias. Dans la même lignée, Chanel avait été fortement décriée à cause de son défilé “en forêt” à la nef du Grand Palais en 2018. Cette représentation avait généré un déferlement de critiques de la part du grand public. La polémique écologique liée à ce défilé a obligé la marque à s’excuser publiquement, justifier la provenance des arbres et replanter une parcelle de 100 chênes. 

Ces réactions, à portée plus ou moins forte, n’ont fait que démontrer l’importance de la digitalisation de cet événement. De plus, au-delà de sa fonction pratique, le rôle symbolique de la mode et son caractère subjectif n’est plus à démontrer. En effet, les tendances reflètent en réalité un sujet bien plus profond : elle démontre en réalité l’évolution de la société, les protestations, et revendications (par exemple dans les années 60 avec l’arrivée de la mini-jupe). 

En conclusion, la stratégie de digitalisation de la Fashion Week contribue à la démocratisation de l’événement au plus grand nombre. En investissant les réseaux sociaux et en invitant des influenceur·euses, les marques de prêt-à-porter et de haute couture espèrent attirer un public plus jeune. Cette cible est d’ailleurs plus sensible à certains enjeux, comme la préservation de l’environnement ou l’inclusivité. Un vrai travail de communication est mené sur tous les fronts par des marques qui veulent de plus en plus montrer leur responsabilisation, avec plus ou moins de succès. En effet, certaines marques véhiculent parfois des messages maladroits et qui ont fait scandale dans la presse et sur les réseaux sociaux. Appropriation culturelle, racisme, promotion de la surconsommation… Aujourd’hui, l’enjeu est d’adapter le message à la cible et de prouver son engagement sur le front de l’éco-responsabilité et de l’inclusivité avec des actions marquantes et des décisions relevant de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). Exit les fausses promesses et les apparences, les marques doivent aujourd’hui montrer qu’elles ont concrètement compris les attentes des consommateurs, qu’on appelle volontiers «consommacteurs» tant leur rôle n’est plus d’être passif dans la consommation de leurs biens et services.  

Sources : 

https://www.lofficiel.be/mode/prada-automne-hiver-22-23-le-defile-de-raf-simons-et-miuccia-prada-a-fait-le-buzz 

https://www.ohmymag.com/people/actu-people/lena-situations-paola-locatelli-les-influenceurs-reperes-a-la-fashion-week_art147745.html 

https://madame.lefigaro.fr/style/fashion-week-les-influenceurs-tiktok-sinstallent-en-front-row-210220-179902 

https://www.cosmopolitan.fr/,la-fashion-week-pour-les-nuls,2178,1863626.asp 

https://sosoir.lesoir.be/le-collier-suicide-givenchy-et-autres-polemiques-de-la-fashion-week-en-pense-quoi 

Que faut-il retenir de la Fashion Week 2022 de Paris ? (carnetsduluxe.com) 

10 points essentiels pour tout savoir sur la Fashion Week (welcometothejungle.com)