La communication non verbale – une communication permanente

La part du non verbal dans la communication n’a pas attendu les temps modernes pour être
reconnue. En effet, c’est un concept ancien, déjà théorisé par Aristote quand il parle de la
rhétorique, l’art de convaincre : l’Éthos, la manière d’être, est pour lui l’un des trois segments
essentiels d’un discours impactant. Mais alors que la rhétorique était généralement réservée
aux tribuns, aujourd’hui c’est aux communicant·es de maîtriser le langage oral et le langage
du corps pour faire passer les messages de manière efficace dans une société multiculturelle
et multilingue.
Selon l’école de Palo Alto fondée dans les années 1950, il est impossible de ne pas
communiquer : tout agissement est communication, tout refus d’agir l’est également : la
communication est bien plus que la simple signification explicite des mots, elle comprend
également tous les messages implicites, intentionnels ou non, exprimés par un comportement
(ton, regard, attitude, etc.).

"Le langage non verbal, ou tout le répertoire de la gestualité, s'inclut dans le cadre des études kinésiques, initiée par l'anthropologue américain Ray Birdwhistell dans les années cinquante du siècle dernier. Conçue en tant qu'étude des mouvements faciaux et corporels, elle s'avérait être un homologue de la phonologie (Birdwhistell 1970). Le geste, en tant qu'objet de la kinésique, est repris chez les chercheurs postérieurs et désigne une expression du visage, une pose, un mouvement des mains, des pieds, de la tête et une manière du corps."
Grigorij Krejdlin
2008

Aujourd’hui, on définit la communication non verbale comme comprenant les expressions
faciales, le ton et la hauteur de la voix, les gestes et les mouvements du corps, ainsi que le
respect de l’espace personnel et de la distance physique. Ces signes constituent le langage
corporel et peuvent fournir des indices, des allusions, des informations supplémentaires et une
signification au-delà du message verbal. Elles aident à mieux comprendre une personne, son
humeur, ses motivations et les raisons de son comportement – ce qui en retour permet
d’adapter son propre langage corporel.

Ainsi, la communication non verbale permet
de :
• renforcer, nuancer ou même infirmer ce
qui a été dit avec des mots (ex : ironie, sousentendus, posture physique plus ou moins
bonne) ;
• communiquer un état émotionnel ;
• définir ou renforcer une relation
interpersonnelle (ex : expression de mépris ou
d’accueil) ;
• fournir un retour d’information (ex :
surprise, colère, curiosité, acceptation…) ;
• réguler le flux du dialogue (ex : signaler
quand il est temps de mettre fin à une
conversation ou quand vous voulez
intervenir).
• etc.

Les indices non verbaux peuvent jouer quatre rôles :
1. La répétition : les indices non verbaux peuvent illustrer un message qu’une personne souhaite
véhiculer verbalement.
2. La contradiction : ils peuvent contredire ou nuancer le message que la personne essaie de
transmettre.
3. La substitution : ils peuvent remplacer un message verbal.
4. Complément et/ou emphase : des gestes ou mimiques peuvent augmenter l’impact du
message.

Types de communication non verbale et langage corporel

On peut catégoriser les différents types de communication non-verbale :

Mouvements et postures du corps

Pensez à la façon dont votre perception des gens dépend de la façon dont iels s’assoient,
marchent, se tiennent ou tiennent leur tête. La façon dont vous vous déplacez et vous vous
comportez est un processus d’échange d’informations avec le monde dans le système dans
lequel vous évoluez. En effet, en adoptant une certaine allure, une certaine posture, vous
utilisez des codes de comportements que vous avez observé dans votre entourage tout au
long de votre vie et qui sont dans une large mesure communs à votre milieu de vie : c’est un
langage que vous partagez avec votre milieu culturel.
Ce type de communication non-verbale comprend la posture, le maintien, l’attitude et les
mouvements subtils.

Les expressions faciales

Le visage humain est extrêmement expressif et est capable d’exprimer d’innombrables
émotions sans dire un mot. Plusieurs tentatives ont été faites pour les catégoriser, le plus
souvent en 5 ou 6 expressions universelles qui seraient innées, et donc communes à toute
l’espèce humaine. Cependant, aucune des études faites sur le sujet n’a pu confirmer ces
affirmations et on peut même constater que le langage corporel est très largement du domaine
de l’acquis : les expressions faciales sont façonnées par la culture d’une personne : son âge,
son genre, son milieu social et son lieu de vie impactent les mouvements du visage et du
corps, même inconscients.

Contact avec les yeux

La perception visuelle étant dominante pour la plupart des gens, le rôle du contact visuel dans
la communication non verbale peut difficilement être surestimé. La façon dont vous regardez
quelqu’un peut transmettre beaucoup d’informations, notamment l’intérêt, l’affection, l’hostilité
ou l’attraction.
Dans les cultures occidentales, le contact visuel est important pour maintenir la fluidité des
conversations, ainsi que pour évaluer votre interlocuteur·trice et lui répondre, mais surtout pour
capter son attention. Cependant, dans d’autres cultures, notamment celles avec une hiérarchie
sociale forte, il est très mal considéré de regarder quelqu’un dans les yeux.

Gestes

Les gestes sont intimement liés au tissu de la vie
quotidienne. Nous saluons, montrons du doigt et
utilisons activement nos mains lorsque nous
discutons ou parlons avec animation. Les gestes
sont souvent inconscients.
Mais encore une fois, leur signification peut varier
considérablement d’une culture à l’autre, il est
donc important de faire attention pour éviter les
mauvaises interprétations lorsque l’on cherche à
faire passer un message à une cible
pluriculturelle, ou simplement se limiter à des gestes vagues, sans faire de signes de mains.
Dans le cadre d’une communication vidéo, de nombreuses organisations multinationales
préfèreront tourner plusieurs versions d’un même message qui seront adaptées à une culture
spécifique, plutôt que de prendre le risque d’un quiproquo.

Espace personnel

Nous avons toutes et tous un besoin d’espace physique qui varie en fonction de notre
caractère, de la situation et de l’étroitesse de la relation : par exemple, un couple n’aura pas
la même distance interpersonnelle que des collègues de travail. Ces distances
interpersonnelles sont plus ou moins standardisées par le milieu culturel dans lequel on
évolue.
Il est possible d’utiliser l’espace physique pour communiquer de nombreux messages non
verbaux différents, notamment des signaux de proximité et d’affection, ou au contraire de rejet,
de mépris ou de domination. Ainsi, une variation inattendue ou trop rapide de cette distance
lors d’une relation établie peut causer de la confusion : par exemple, une personne qui prend
ses distances avec son ou sa partenaire romantique, ou un ou une collègue qui se rapproche
soudainement.

Le toucher

Nous communiquons un grand nombre d’informations par le toucher. Pensez aux messages qu’une personne transmet à une autre par les interactions suivantes : une poignée de main faible, une tape timide sur l’épaule, une étreinte chaleureuse, une tape apaisante dans le dos, une tape condescendante sur la tête…
Lors d’une communication professionnelle, il est nécessaire de définir avec attention et précision ce qu’un contact doit exprimer : c’est une interaction forte qui suppose un consentement indubitable de la part de l’interlocuteur·trice
car celui·celle-ci s’expose et se rend vulnérable. Une situation ou ce consentement serait forcé pourrait provoquer des réactions très négatives, d’autant plus ces dernières années, avec les vagues de dénonciations de harcèlement moral ou sexuel ou des agressions subies dans les milieux professionnels. 

Voix

Il ne s’agit pas seulement de ce que vous dites, mais aussi de la manière dont vous le dites.
Lorsque nous parlons, les autres personnes interprètent notre voix, en plus de donner un sens
aux mots, et parfois la voix éclipse complètement les mots qu’elle porte.
Voici à quoi votre interlocuteur·trice prête attention :
• le ton,
• le tempo,
• le timbre et la hauteur de la voix,
• l’intonation,
• des sons qui traduisent la compréhension (onomatopés) : aha, oh, ah, hm, oui, etc.
Pensez à la façon dont le ton de la voix d’une personne peut indiquer des informations
supplémentaires à l’interlocuteur·trices, comme l’état émotionnel de la personne qui s’exprime,
(la colère, l’affection ou la confiance), mais aussi complètement transformer l’information
véhiculée en ajoutant une opinion : sarcasme, mépris, ironie, ennui…
En conclusion, connaître les types de communication non verbale nous permet de mieux
comprendre comment les autres s’expriment, car ils sont produits et captés par tous les sens,
ce qui forme de véritables canaux de communication. Pourtant, il ne faut pas oublier que bien
que toute l’espèce humaine communique, les codes de la communication, qu’elle soit verbale
ou corporelle, ne sont pas universels, et c’est aussi tout l’intérêt du métier et du savoir-faire
du·de la communiquant·e.

 

Article rédigé par Meri Grigoryan et Florence Lacroix