Harcèlement sexuel : Quelle place occupent les journalistes ?

Depuis octobre 2017, impossible de passer à côté d’accusations visant des personnalités publiques de harcèlement sexuel. Le 5 octobre 2017, le New York Times révèle les accusations faites à l’encontre du producteur américain, Harvey Weinstein. Une affaire d’abord discrète, retranchée dans la rubrique « potins »  des magazines, puis centrale. Ces dernières années, la France a été frappée par plusieurs scandales de harcèlement sexuel, l’affaire Weinstein fut apparemment celle de trop. Les affaires de harcèlement sexuel précédentes, furent les secousses, avant le grand séisme. Les journalistes ont un rôle essentiel dans ces affaires. C’est à eux que revient le choix et la responsabilité d’en parler au monde. Quels sont les différents rôles choisis pas les journalistes dans ces affaires ? Comment se positionnent-ils face au harcèlement sexuel ? Est-il possible de rester neutre ? Réponse dans l’article de cette semaine.

Le harcèlement, sujet difficile à traiter ?

Tout d’abord, le harcèlement sexuel apparaît comme un sujet épineux à traiter pour les journalistes. Faute de preuves, ils se retrouvent souvent à confronter la parole de la victime et de l’agresseur. Ils doivent être vigilants concernant leur vocabulaire. Le mot « victime » est à double tranchant par exemple. Un tel mot est parfois dur à entendre pour ces femmes qui ne veulent surtout pas paraître faibles et sans défense. Les témoignages sont aussi difficiles à récolter, car les femmes ne veulent pas parler seules. C’est un travail long et minutieux.

Informer

Par ailleurs, les journalistes ne relatent pas seulement les faits. Ils ont aussi le devoir de faire circuler une meilleure information. Dans un documentaire réalisé par Andrea Rawlins-Gaston et Laurent Follea, sur le  “Harcèlement sexuel au travail : l’affaire de tous”, on apprend que 3 français sur 5 peinent encore à faire la différence entre séduction et harcèlement sexuel. Ce reportage a pour but de répondre à des questions dont les réponses restent encore vagues dans les l’esprit des Français : Comment reconnaît-on le harcèlement sexuel ? Comment aider une victime ?

Conseiller

Prenons la une, est un « Collectif de femmes journalistes pour une juste représentation des femmes dans les médias et l’égalité professionnelle dans les rédactions. ». Sur leur site web, elles ont rédigé un article pour aider leurs collègues journalistes à traiter correctement les affaires de violences faites aux femmes. Ainsi, elles expliquent à leurs confrères de « ne pas donner des conseils ou des leçons. « Ne pas sortir le soir » ou « Faire preuve de discrétion » laissent penser que la femme provoque le harcèlement sexuel.

Sur les réseaux sociaux, l’amalgame est souvent facile : « tous les hommes sont des harceleurs ». Dans cette déferlante d’accusations, un homme peut alors se sentir perdu, il ne sait pas s’il a le droit de donner son avis sur le sujet. Emilie Tôn, journaliste de l’Express, souhaite justement conseiller les hommes, qui ne se reconnaissent pas dans le mouvement #metoo. Elle rédige un article « à l’attention des hommes qui souhaitent aider ». Elle explique point par point, les différentes étapes, pour pouvoir aider les femmes victimes de harcèlement sexuel.

Alimenter le débat

Enfin, parmi ces journalistes se trouvent des femmes, qui se sentent concernées par le problème, en raison de leur sexe et leurs expériences. Sandra Muller, journaliste, elle-même victime de harcèlement sexuel dans le cadre de son emploi, est celle qui a lancé le fameux #balancetonporc. Parfois, les journalistes ne peuvent pas se cantonner au rôle de relayeur d’information. Par conséquent, ils peuvent entretenir eux-mêmes le débat, en partageant leurs opinions. Ces personnes, le plus souvent des femmes, alimentent le débat en fonction de leurs expériences personnelles face au harcèlement sexuel. Ce n’est plus un constat objectif qu’elles établissent sur le sujet, elles refusent de rester neutres. Une autre journaliste, Elisabeth Levy, a quant à elle, décidé de signer la tribune « le droit à être importunée » et dénonce le retour du puritanisme sur les réseaux sociaux.

Le débat sur le harcèlement sexuel divise les journalistes, les genres et les femmes elles-mêmes. Nombreux sont ceux qui ont insisté sur cette image de division que renvoyait ce désaccord sur #balancetonporc. Mais comment les femmes pourraient-elles avoir le même avis sur le sujet ? A-t-on déjà été surpris de constater que les hommes avaient des désaccords entre eux ? Le sujet du harcèlement sexuel, très présent dans les médias, n’a visiblement pas fini de diviser. L’unité paraîtrait davantage souhaitable pour lutter contre ce mal de plus en plus récurrent dans notre société.

Auteur : Cécile Fouqué